Cinéma Festivals

Inhebbek Hedi

Inhebbek Hedi est un film réalisé par Mohamed Ben Attia avec Majd Mastoura, Rym Ben Messaoud. Vivant en Tunisie, juste après le printemps arabe, Hedi est un jeune homme sage et réservé, travaillant comme commercial à Peugeot, plié aux conventions sociales et obéissant à sa famille malgré son âge, il les laisse organiser et décider de son propre mariage. Tout est pour le mieux dans ce rythme monotone, jusqu’au jour où Hedi rencontre Rim, l’image même de l’indépendance. Tout le séduit en elle; sa légèreté, sa force, sa vie nomade. Pour la première fois, il est tenté de prendre sa vie en main, de lui tenir la sienne, de parcourir le monde avec elle.

Il va à la quête de soi. Il brise ses propres barrières dans le vécu excentrique et léger de ‘cet autre.’ Il va au-delà de tous ses carrés tracés à l’avance; l’éducation, la famille, le travail, le mariage, la pudeur, l’obéissance et le respect de l’autorité. Il brise tous les ponts conditionnés jusqu’à retracer ou retrouver ses propres limites. 
Où s’arrêterait-il?

 

Rencontre avec le réalisateur du film, Mohamed Ben Attia

A travers le parcours de Hedi, son parcours et son histoire d’amour, on pouvait raconter un peu plus le pays d’une façon indirecte, dit Mohamed, mais on a essayé de faire les choses subtilement. De jeunes spectateurs ne perçoivent parfois que l’histoire d’amour et c’est parfaitement valable mais le but principal demeure de voir toute l’allégorie derrière cette histoire pour lire un peu l’histoire du pays.

Parlant des fonds nécessaires à la réalisation d’un projet pareil, Mohamed atteste que les fonds étaient raisonnables, à comparer avec le temps consacré au tournage: ‘l’essentiel au début c’est de se laisser aller à une envie de raconter une histoire sans penser à la faisabilité,’ affirme-t-il.

Au sujet de la direction d’acteurs, Mohamed affirme que l’on peut travailler avec des gens qui n’ont pas d’expérience préalable dans le domaine du cinéma ou ayant nécessairement poursuivi des études d’actorat. ‘C’est ce que je préfère d’ailleurs,’ dit-il. J’ai une patience énorme à expliquer aux acteurs leurs rôles, mais la condition ultime pour moi, c’est qu’ils aient une certaine sensibilité leur permettant d’accéder à cet univers. Dans le cas de ce film, c’est la combinaison des deux.’ Pour lui, trouver une personne assez flexible, curieuse et sensible, permetterait au réalisateur d’aller très loin dans la direction d’acteurs.

En évoquant l’amour que l’on pouvait percevoir dans le jeu des acteurs, allant au-delà de la sensualité, Mohamed affirme: ‘C’est la chance! Très vite, on a su que Majd Mastoura allait jouer le rôle de Hedi. On m’avait alors beaucoup parlé de Rym. J’étais un peu reticent pour Rym, -dont le prénom est aussi Rym dans la vraie vie- et je pensais qu’elle devrait avoir une beauté un peu plus naturelle. Pourtant, quand je l’ai rencontrée, j’ai remarqué en elle une sorte de substance brute qui la rendait encore plus belle. Son côté un peu masculin dans sa façon de bouger, de s’asseoir, la rendait plus naturelle, et correspondait au profil que je cherchais dans l’actrice. Après les essais caméras en filmant le couple, il s’est avéré que cela fonctionnait. C’est de la pure magie, parce que l’on a beau préparer, des fois cela fonctionne et d’autres en aucun cas.’

Quant aux prix au festival de Berlin, Mohamed Ben Attia enchaîne, ‘Je suis très reconnaissant pour tout ce qui s’est passé à Berlin parce que cela m’a ouvert des portes des festivals afin de partager des histoires avec le public mais c’est toujours l’envie de raconter des histoires qui prime pour moi. Elle demeure imprévisible. Lorsqu’on s’accroche à une idée, on ne pense ni à l’avenir, ni aux festivals. On ne garde en tête que le vrai plaisir de raconter la vie de ces personnages. On vit et dort avec ces histoires-là. Cela va au-delà du résultat.’

Faisant part de ses projets futurs, le réalisateur nous confie qu’il vient de finir un autre film et espère passer à l’étape de la réalisation. ‘La difficulté de cette histoire ne se limite pas aux sociétés arabes ou musulmanes mais au fait d’être heureux à travers un modèle bien determiné. C’est la quête d’un pseudo-bonheur si Bonheur existe,’ dit-il. ‘Cela rejoint aussi le thème de ce film, mais c’est poussé vers une idée un peu plus complexe. C’est toujours l’aspect social et la perpétuelle remise en question de ce que l’on recherche; se définit-on en tant que père, époux ou travailleur? Ces thèmes se reflètent à travers des personnages très simples et ordinaires mais se déplacent vers quelque chose de plus universel,’ affirme Mohamed.