Exprimant sa gratitude pour tous les mécènes de Beirut Spring Festival, Gisèle Khoury introduit à la mémoire de Samir Kassir le spectacle scénique de clôture du festival au sein des vestiges des thermes romains datant du 1er siècle, au centre-ville. “Beyrouth, amante de la mer” reflète Beyrouth, “ville de pardon, siège des différentes nationalités et confessions” , clame-t-elle.
Le spectacle tridimensionnel, produit par Beirut Spring Festival est une communion d’efforts où plus de 60 artistes, professionnels multimédias, techniciens et chanteurs se sont réunis pour la réaffirmation d’un passé qui nous a vus naître. Cette période surnommée maintenant “vintage” est l’âge d’or de Beyrouth. Le concepteur et réalisateur Milad Tawk, le compositeur dirigeant de l’orchestre Elie Barrak, les chanteurs Dalia Saab, Ingrid Naccour, Elie Nakhlé et Nader Khoury offrent aux spectateurs une représentation mêlant l’oriental à l’occidental dans un jeu d’images, de lumière et de sons au coeur de la ville stoïque.

Beyrouth l’amante, la chérie, la préférée de la mer.
Parce qu’elle tient des amantes la fougue de la passion, de la joie de vivre, des folies -bergères-, mais aussi le goût amer-sucré de l’éphémère, celui qui ne dure pas, celui qui qui s’en va en sifflant, le gai, l’enthousiaste, le riposteur. Ainsi riposte aussi Beyrouth, légère et pourtant riche d’un vécu sans pareil, aussi douloureux que flamboyant.

Beyrouth la femme.
Celle aux couleurs feu et eau à la fois. Celle qui séduit par son charme, ouverte aux brises, assoiffée de lumière… inaccessible et splendide dans son authenticité. Elle est. Sans artifices, sans accessoires. Juste des images, des souvenirs qui reviennent de loin, comme un parfum. Éthérée. Magique.

Beyrouth la mère.
Celle qui embrasse et qui étreint. Tout. Et l’on voit défiler sur grand écran les grands, ceux, celles, qui perdurent face au temps railleur et injuste, souvent… parfois. Fairuz, Sabah, Riad Charara… des images, des visages qui nous reviennent de loin et nous transportent au pays des merveilles, celui d’hier, en ce temps-là. L’immensité de la ville redevient cocon. Elle est déesse de toutes les mères. On oublie alors tout, jusqu’à notre propre identité et l’on se blottit dans les entrailles de ce tout en un, là où les “différentes nationalités et confessions” sont enracinées dans une seule ville. Beyrouth nous a tous enfantés. Beyrouth est pardon.

“… Mais curieusement Beyrouth est une cité qui renaît chaque jour de ses cendres: elle panse ses plaies, efface ses ruines, poursuit sa reconstruction, exprime sa volonté de survivre, malgré tout, malgré tous » -Beyrouth ou la fascination de la Mort, Issa Maalouf. En effet, en ce soir de commémoration dans la joie, la finale se fait avec l’hymne national libanais. On se lève par choix, la chair de poule dans la peau, les mêmes paroles sur les lèvres. On en oublie Histoire et dates, revendications et slogans et l’on s’abandonne corps mais surtout âme à une immersion totale des sens… essence de vie… et puis l’on repart, dans la tête un refrain éternel: Beyrouth.
Marie-Christine Tayah